Dans la rue, l’état d’urgence continue

Dans la rue, l’état d’urgence continue

Aujourd’hui, l’ADSF – Agir pour la santé des femmes souhaite alerter l’ensemble des acteurs du monde de la santé, du social, des associations et des autorités publiques, sur des situations qui ne peuvent plus rester invisibles.

Pendant la période de confinement, Mme M a été orientée par des bénévoles de la Croix Rouge vers le Repaire Santé de l’ADSF dans le 18ème arrondissement de Paris. Faute de ressources, elle était à la rue : nous l’avons mise à l’abri en réponse à la crise sanitaire.

Mme M a 72 ans et un jeune chien.

Depuis la fin de la trêve hivernale il y a plus de deux mois, aucun dispositif d’accueil, d’hébergement, d’insertion et d’accès au logement des personnes sans abri n’a trouvé de solution pour Mme M, puisque le 115 nous indique qu’il n’existe à ce jour pas de place d’hébergement pour les femmes avec animaux. L’ambassade dont elle relève nous laisse sans réponse, de même que les autres associations pouvant lui venir en aide. En lien fort avec l’EMPP – Équipes mobiles Psychiatrie Précarité, nous arrivons aujourd’hui au bout de l’aide que nous pouvons lui apporter. A 72 ans, en perte d’autonomie et par sa situation administrative, elle ne peut plus travailler, et ne peut pas obtenir de place en EHPAD.

Mme Z a été mise à l’abri – dans le cadre du confinement décidé suite à la crise sanitaire du Covid-19 – pendant plus de six mois, par notre association. Les équipes mobiles de l’ADSF l’avaient rencontrée dès avril 2019 en maraude. Aucune possibilité d’hébergement ou d’accueil dans des structures adaptées n’est accessible pour elle, dans l’attente d’un certificat médical.

En effet, Mme Z a 24 ans et est suspectée déficiente mentale.

Depuis que nous l’avons rencontrée, Mme Z ne parvient pas à obtenir une prise en charge dans une structure adaptée à cette suspicion de déficience mentale, ainsi que pour une pathologie chronique non-traitée. Après chacune de ses crises d’épilepsie, Mme Z est remise à la rue par les différents services des hôpitaux – y compris lorsqu’elle présentait des symptômes du Covid-19. Dans cette situation, Mme Z représente un danger pour elle-même, mais aussi pour les bénévoles et salarié·e·s qui l’accompagnent dans nos structures, qui ne lui sont pas adaptées.

Pour elles, le monde hospitalier et l’ensemble des structures de droit commun ont été dans l’incapacité de nous proposer une prise en charge adaptée à leur situation sociale et de santé. Les autorités régionales de la santé et de l’hébergement ont été informées de ces situations, et également dans l’incapacité de nous apporter des solutions.

Comme toutes les personnes à la rue, Mme M et Mme Z sont en danger, et mettent en danger toute la population, dans le cadre de l’épidémie du Covid-19, qui est encore aujourd’hui très inquiétante. Les arrêtés préfectoraux rendant le port du masque obligatoire dans certains lieux d’Île-de-France, ne correspondent aucunement à la réalité du quotidien des personnes à la rue.

Comme toutes les femmes à la rue, Mme M et Mme Z sont surexposées à toutes les formes de violences – physiques, mentales, sexuelles, sociales. Le risque de violence est aggravé par leur conditions de vie : le grand âge de Mme M et le handicap de Mme Z.

Alors que l’état d’urgence sanitaire, la trêve hivernale et le plan canicule ont été levés, la situation des femmes en situation de précarité reste en état d’urgence. Nous demandons des réponses adaptées à leur situation, pour casser ce système d’invisibilisation de ces femmes et de leurs conditions de vie – pauvreté, vieillesse, handicap, violences.